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Maladie virale se manifestant par une éruption cutanée, le mpox est en recrudescence en République Démocratique du Congo (RDC) et plusieurs autres pays africains. En août, l’OMS a déclaré l’épidémie "urgence de santé publique de portée internationale". En Belgique, aucun cas du nouveau variant n’a été détecté.
Publié le: 19 septembre 2024
Par: Julie Luong
7 min
Photo: © Belga Image // Fort heureusement, il existe plusieurs vaccins contre le mpox.
Le mpox une maladie infectieuse proche de la variole qui a été observée chez le singe, puis chez l’humain, dans les forêts tropicales du Congo, à partir des années 70. "Initialement, l’infection faisait suite à des contacts avec des animaux dans la forêt. le plus souvent des rongeurs, même si aujourd’hui encore, on ne connaît pas très clairement le réservoir, explique Emmanuel Bottieau, infectiologue à l'Institut de médecine tropicale d’Anvers (ITG). Il y avait une circulation sporadique du virus, avec de temps en temps quelques transmissions au sein d’une famille."
Parallèlement, un sous-type du virus (clade II) a été identifié en Afrique de l’Ouest. En mai 2022, une variante de ce clade II (clade IIb) s’est répandue au niveau mondial. Se transmettant le plus souvent par voie sexuelle, le clade II b a causé quelque 80.000 cas, dont 789 cas en Belgique, essentiellement parmi les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes.
Fin 2023, une variante du clade I (clade Ib), qui se transmet aussi par voie sexuelle, y compris dans le cadre de rapports hétérosexuels, est apparue en RDC. "Le virus s’est probablement transmis via les réseaux de prostitution qui se développent autour des grandes mines de l’Afrique de l’est, jusqu’à déborder dans les pays voisins", détaille Emmanuel Bottieau. En 2024, 24.000 nouveaux cas de mpox ont été comptabilisés dans 13 pays africains, et 600 décès, en très grande majorité en RDC. Le premier cas de clade Ib hors d'Afrique a été signalé en Suède le 15 août 2024. Actuellement, aucune infection par ce variant n'a été détectée en Belgique.
Stigmatisante, l’appellation "variole du singe" n’est plus utilisé pour désigner la maladie. "La stigmatisation ou la discrimination liée à un problème de santé peut retarder la demande de soins, compromettre la qualité des soins et entraver l’accès aux services de santé pour les plus vulnérables", rappelle l’OMS.
La variole du singe se manifeste par un syndrome grippal (fièvre, douleurs musculaires, maux de tête, malaise général, ganglions) dans les 5 à 21 jours après l'infection, suivi de lésions cutanées sous forme de plaques rouges, de boutons, de vésicules ou des pustules, qui forment ensuite des croûtes avant de guérir spontanément. Les lésions cutanées, parfois douloureuses, apparaissent en général au niveau du visage, des mains, des pieds, de la bouche, des organes génitaux mais peuvent être présentes à n’importe quel endroit du corps. Elles sont souvent accompagnées de ganglions gonflés et douloureux.
Le mpox s’attrape le plus souvent par contact physique rapproché, en particulier lors des rapports sexuels, avec une personne infectée. La transmission se fait via les lésions cutanées (les lésions contiennent beaucoup de virus) mais aussi via les fluides corporels (salive, sperme, etc.) ou les muqueuses. L’utilisation de linge (vêtements, draps, serviettes, etc.), d’ustensiles de toilette (brosses à dents, rasoirs, etc.), de vaisselle, de sextoys, de matériel d’injection ou autres objets contaminés est également à risque. Dans une moindre mesure, la transmission peut aussi se faire par gouttelettes de salive épaisse (postillons, éternuements) "mais moins par petites gouttelettes, comme pour le Covid, commente Emmanuel Bottieau. On estime qu’une personne peut être contagieuse à partir de deux à trois jours avant les symptômes, mais que, contrairement au Covid, la transmission asymptomatique (ndlr : transmettre sans être soi-même malade) est rare."
Actuellement, il n’existe aucun traitement spécifique contre le mpox. En janvier 2022, le Tecovirimat, considéré comme le médicament le plus prometteur, a reçu une autorisation de mise sur le marché dans des circonstances exceptionnelles par l'Agence européenne du médicament. Malheureusement, les résultats d’essais préliminaires montrent que cet antiviral ne serait pas efficace contre le sous-type clade I et clade Ib. Le médicament n’est donc actuellement utilisé qu’à des fins de recherche. En revanche, les symptômes du mpox peuvent être soulagés par des analgésiques (contre la douleur), des antipyrétiques (contre la fièvre), des médicaments contre les démangeaisons, etc.
Emmanuel Bottieau, infectiologue
Emmanuel Bottieau, infectiologue
Le mpox est un virus proche de la variole, mais qui cause une maladie souvent beaucoup moins grave. Éradiquée au niveau mondial depuis la fin des années 70 grâce à la vaccination, la variole (ou "petite vérole ") se révélait très contagieuse et souvent mortelle. Les personnes vaccinées dans l’enfance contre la variole (vaccin obligatoire en Belgique jusqu’en 1976) pourraient être protégées contre le mpox, même si la protection vaccinale diminue avec le temps.
"Le mpox est très peu mortel en soi", explique Emmanuel Bottieau. Selon les dernières études disponibles, quand les soins sont accessibles, la mortalité du mpox n’excède pas 1 à 3 %. "Dans la majorité des cas, on guérit spontanément après 3 semaines, poursuit le spécialiste, un peu comme dans la varicelle. Néanmoins, chez des populations qui vivent dans des conditions plus précaires et n’ont pas accès aux soins, les lésions peuvent se surinfecter jusqu’à des situations assez graves en l’absence de traitements antiseptiques et antibiotiques." Les patients immunosupprimés et les enfants en bas âge sont particulièrement à risque. Les lésions présentes dans la bouche peuvent par ailleurs favoriser la dénutrition.
"Dans un premier temps, il faudrait essayer de diagnostiquer les cas rapidement grâce à des tests moléculaires", estime Emmanuel Bottieau. En effet, au moment de l’apparition des premiers symptômes, il est très difficile de faire la différence entre le mpox et la varicelle. Sur base de prélèvements, il est cependant possible d’obtenir une confirmation du diagnostic (test PCR). "Ensuite, il faudrait pouvoir isoler, non pas de manière drastique car la transmission est moins importante qu’avec le covid, mais en essayant tout de même que les personnes ne circulent pas trop dans la communauté pendant 2 ou 3 semaines."
Il existe plusieurs vaccins contre le mpox. Si leur efficacité n’est pas parfaite – des cas d'infections post-vaccinaux ont été signalés –, ils font partie des outils pour lutter contre l’épidémie. Actuellement, la vaccination de masse n’est pas recommandée. Selon l’OMS, la vaccination doit être envisagée uniquement chez les personnes à risque (ayant été en contact étroit avec un cas de mpox ou appartenant à un groupe à risque élevé d’exposition à la maladie). Début septembre, la Belgique a fait don de 20.000 vaccins de son stock stratégique à la RDC.
Le risque d'infection par la variante Clade Ib du virus est considéré comme très faible pour la population belge. Cependant, la vaccination préventive est possible en Belgique dans les centres de référence VIH pour les hommes gays et bisexuels (HSH) et pour les personnes transgenres qui n'ont jamais reçu de dose, ni dans l'enfance (contre la variole), ni en 2022 (au moment de la flambée du variant clade IIb).
La flambée de clade I touche les grandes villes de la RDC, notamment Goma et Kinshasa, et s'étend aux pays voisins tels que le Burundi, le Rwanda, le Kenya et l'Ouganda. Si le risque reste faible pour les voyageurs, il est recommandé d'éviter les contacts rapprochés avec des personnes infectées (ou susceptibles de l'être), et le contact avec des surfaces ou des objets contaminés, tels que la literie ou les serviettes.
"On aura probablement de temps à autre un cas importé, un humanitaire ou un voyageur, mais je ne m’attends pas à une épidémie importante en Europe, rassure Emmanuel Bottieau. Depuis une dizaine d’années, toute la communauté médicale est très sensibilisée, notamment par rapport aux cas fébriles. C’est par ailleurs une maladie très visible, qu’on connaît depuis longtemps, pour laquelle on a des vaccins, qui présente peu de cas de transmissions présymptomatiques ou asymptomatiques et dont la mutation est relativement lente. On a donc plusieurs facteurs protecteurs par rapport à une extension de l’épidémie."