
Droits du patient
Parasite de la famille des araignées et des acariens, une tique peut causer une morsure généralement sans gravité mais nécessitant un suivi attentif. En Marche vous dit tout sur cet hôte hématophage (qui se nourrit de sang), pas très sympathique.
Publié le: 23 mai 2025
Par: Sandrine Cosentino
7 min
Photo: ©AdobeStock
Dès que la température se situe entre 7 et 10°C, elle grimpe sur les buissons ou les herbes hautes et attend patiemment qu'une proie passe pour s'y accrocher et prendre son repas sanguin. Elle, c'est la tique. La proie, c'est un animal sauvage, domestique… ou un humain ! Ce parasite rampe et ne s'aventure pas dans les hauteurs boisées, il n'y a donc aucun risque qu'elle saute d'un arbre dans votre cou. Elle peut transmettre certaines maladies, dont la plus connue est la maladie de Lyme. Cependant, la probabilité de tomber malade
reste faible.
L'espèce la plus courante présente en Europe et en Belgique est la tique dite "du mouton" (Ixodes ricinus). D'après des études menées par Sciensano en 2017 et 2021 (voir encadré), elle est responsable de 99 % des morsures recensées en Belgique, chez l'être humain.
Bien que l’on parle souvent de 'piqûre', il s’agit en réalité d’une morsure, car la tique s’accroche à la peau avec ses crochets pour se nourrir de sang.
La période critique pour être mordu s’étend de mars à octobre, avec un pic entre mai et juin. Ces parasites sont surtout actifs au printemps et à l'automne, quand les températures sont propices à leur développement. Ils affectionnent les endroits ombragés, couverts d’une litière épaisse ou densément envahis par les broussailles, les fougères, les herbes hautes. En été, lorsqu’il fait trop chaud ou trop sec, ils se réfugient dans la couche de feuilles mortes ou en-dessous de buissons pour maintenir leur humidité. Pourtant, c’est durant cette saison que Sciensano enregistre le plus de morsures car nous portons des vêtements moins couvrants.
"De façon générale, on associe les tiques avec une balade dans les bois, rapporte Tinne Lernout, chercheuse pour Sciensano, l'Institut national de santé en Belgique. Mais grâce aux informations récoltées depuis 2015, nous avons remarqué que de nombreuses personnes sont également mordues dans leur jardin. Une bonne raison d’être aussi vigilant lors du jardinage."
Pour diminuer les risques d'être victime de cette petite bête, quelques précautions s'imposent :
Aucune protection n'est efficace à 100 %. L'animal peut être minuscule, passer sous les vêtements et se déplacer. Il se fixe de préférence dans les zones chaudes et humides du corps. Une inspection minutieuse, après la promenade, est nécessaire, surtout sur la tête, derrière les oreilles, sous les aisselles, autour du nombril, à l’aine, entre les fesses, derrière les genoux et entre les orteils. Il est recommandé de vérifier de nouveau la peau après 24h et 48h.
Un comité d'experts suit de près l'évolution de la maladie de Lyme en Belgique et met à jour régulièrement un guide de recommandations nationales.
Le premier réflexe est de retirer la tique rapidement en utilisant une pince ou une carte (voir encadré). Utiliser de l'huile, de l'éther ou du feu augmente les risques de régurgitation de la tique et donc de transmission de bactéries infectieuses. À proscrire ! La région cutanée affectée devra être soigneusement désinfectée avec un antiseptique.
Dans les quatre semaines qui suivent le retrait du parasite, une surveillance est de mise. Il est préférable de prendre une photo, de noter la date et l'endroit touché. Immédiatement autour du contact, une rougeur inflammatoire, non extensive, peut se manifester et disparaître en 48 à 72 heures. Cette réaction à la salive du parasite est généralement sans danger. En revanche, un érythème migrant peut apparaître entre 2 et 30 jours après le contact. C'est le signe le plus courant d'une infection par la bactérie Borrelia.
Un érythème migrant est un anneau rouge sur la peau qui s’étend progressivement, sur 5 à 15 centimètres, à partir de la zone de la morsure. Cette rougeur n’est pas douloureuse et disparaît spontanément en quelques semaines. Cette réaction peut donc passer inaperçue. D'autres symptômes de type grippaux peuvent se manifester tels que de la fièvre modérée, de la fatigue, des douleurs musculaires et des maux de tête. "Mais le virus de la grippe ne circule généralement pas en été, rappelle Tinne Lernout, épidémiologiste chez Sciensano. Ces signaux suspects doivent donc nous alerter d'une possible contamination." Il est alors indispensable de consulter un médecin généraliste rapidement.
Si le diagnostic de la maladie de Lyme est confirmé à la suite de l'observation clinique, un traitement par antibiotiques sera prescrit pour une durée de 10 jours. Certains patients se plaignent de douleurs, de fatigue chronique ou des troubles de concentration persistants et parlent de "maladie de Lyme chronique". Le terme "chronique" peut prêter à confusion, car il laisse penser, à tort, à une infection continue.
Aucune étude à ce jour n’a montré que la bactérie Borrelia reste présente dans le corps après un traitement bien conduit. La communauté scientifique parle plutôt de "syndrome post-Lyme", un phénomène encore mal expliqué, possiblement lié à une réaction du corps à l’infection. Ceci est également observé après d’autres infections. Le sujet reste à l’étude et mérite des recherches plus approfondies.
Dans la majorité des situations, une morsure de tique est inoffensive. Tinne Lernout se veut rassurante : le risque d'infection reste faible. "Les analyses réalisées par Sciensano en 2017 et 2021 sur la recherche d'agents pathogènes nous ont permis de déterminer qu'environ 10 % des spécimens adultes et des nymphes sont infectées par la bactérie Borrelia responsable de la maladie de Lyme", révèle-t-elle. Mais une tique porteuse ne signifie pas nécessairement l'infection.
Lors de la succion du sang, la bactérie Borrelia se déplace de l'intestin vers les glandes salivaires de l'animal. Ce phénomène prend entre 12h et 24h. La transmission de la bactérie reste donc faible si ce "suceur de sang" est retiré rapidement. Après une morsure, la probabilité de développer la maladie de Lyme est d’environ 1 à 3 %. "Et même si la bactérie est transmise à l'humain, chez environ la moitié des personnes, l'organisme sera capable de se défendre et la maladie ne se développera pas", affirme la chercheuse. Les autres maladies, comme l'encéphalite à tiques ou le syndrome de l'alpha-Gal, restent très rares en Belgique (à peine quelques cas par an).
Les activités en plein air sont excellentes pour notre santé et notre bien-être. Le risque d'être infecté par une tique ne doit donc pas nous empêcher d'en profiter.
De nombreuses informations circulent sur la manière d'enlever une tique. Sciensano prodigue des conseils très simples. Aucun produit ne doit être appliqué sur la bestiole. Il est également important de ne pas comprimer son abdomen pour éviter qu'elle ne régurgite.
Certaines notices de pinces indiquent de tourner avant de l'enlever. Cette instruction ne repose sur aucun fondement scientifique. Un seul mouvement, tout droit, suffit à se débarrasser de cet hôte incongru. "Il existe aussi des cartes à tique, évoque Tinne Lernout, chercheuse chez Sciensano. Cela ressemble à une carte bancaire avec deux petites encoches. On la glisse le long de la peau et on tire tout droit. C'est également très pratique à glisser dans son portefeuille."
photo: ©AdobeStock
Depuis 2015, la plateforme citoyenne et scientifique TiquesNet récolte les déclarations de morsures de tiques pour évaluer les périodes et les zones à risque ainsi que l'évolution du phénomène dans le temps. Un baromètre du risque actuel et une carte de Belgique révélant les zones de notifications des morsures sont disponibles sur leur site. Des analyses approfondies des parasites envoyés par les citoyens ont également été réalisées en 2017 et 2021. Une nouvelle vague de tests est en cours. Ces études sur des centaines de spécimens fournis par les citoyens (1.599 en 2017 et 972 en 2021) permettent d'évaluer la prévalence bactérienne et de décider s’il faut adapter les recommandations.
Pour signaler une morsure sur un être humain, un petit questionnaire simple et anonyme est accessible sur le site tiquesnet.sciensano.be. Jusqu'au 31 octobre, vous pouvez également aider la recherche en envoyant par la poste la tique chez Sciensano. Les étapes à suivre sont bien détaillées sur le site.