Incapacité de travail
Des problèmes d’attention, de concentration et de mémoire peuvent apparaître après seulement quelques mois de consommation excessive, même ponctuelle.
Publié le: 24 août 2023
Par: Julie Luong
4 min
Photo: © AdobeStock - Le binge-drinking se traduit en français par beuverie express.
Boire, mais vite. Défini comme une consommation de plus de quatre ou cinq verres en moins de deux heures, le binge drinking vise à atteindre rapidement un état d’ivresse. "C’est une forme de beuverie express. Ce qui est recherché est un effet psychotropique de type drogue, avec des effets en termes de désinhibition, d’euphorie, etc.", explique le Dr Thomas Orban, auteur de "L’alcool sans tabous, spécial 12-35 ans" (éditions Mardaga, 2023). Cette pratique est fréquente puisque 40 % des adolescents et 30 % des adolescentes reconnaissent un épisode d’intoxication éthylique de ce type au cours du dernier mois. Pour Pierre Maurage, chercheur en psychologie à l’UCLouvain, il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau : "Depuis les années 60, la consommation quotidienne d’alcool dans la population a beaucoup diminué : par contraste, les pratiques de binge drinking qui étaient avant noyées dans la masse ont été mises en avant." Contrairement à l’image qui en est souvent donnée, cette pratique n’est pas non plus réservée aux jeunes : "Si je vais chez des amis et que je bois 7 ou 8 doses d’alcool, je ne vais pas appeler ça du binge drinking parce qu’en tant qu’adulte, je sais me tenir... mais c’est quand même du binge drinking", souligne Pierre Maurage.
Le binge drinking peut avoir, à court terme, des conséquences graves : accidents de la route, conduites violentes, comportements sexuels à risque... Il accroît aussi à long terme le risque de devenir dépendant à l’alcool. Les jeunes courent cependant un danger spécifique car jusqu’à 20-25 ans, leur cerveau est encore en développement. "Une consomamtion en montagne russe est plus néfaste pour le cerveau qu’une consommation mieux répartie dans le temps, détaille Pierre Maurage. Or, pour une même quantité d’alcool, un cerveau qui est toujours en développement va subir des effets plus forts, plus massifs et plus durables qu’un cerveau mature." Ces effets neurotoxiques, connus depuis longtemps, apparaissent en réalité beaucoup plus rapidement qu’on ne le pensait. "Avant, on croyait qu’il fallait plusieurs décennies pour que l’alcool ait des effets sur les capacités intellectuelles : on sait aujourd’hui que c’est faux. Notre équipe a montré qu’en 9 mois de binge drinking, les étudiants de première bac présentaient déjà un ralentissement de leur fonctionnement cérébral, avec des effets sur les capacités d’attention, de concentration et de mémoire." Bien que potentiellement réversibles, ces effets sont durables. "Ce n’est pas en arrêtant de boire 15 jours avant les examens que ça se rétablit", pointe Pierre Maurage. Pour préserver ses facultés et ses chances de réussite, mieux vaut donc se modérer... toute l’année.