Alimentation

Marketing des boissons sucrées : ne pas avaler tout ce qu'on nous dit

Les marques de boissons sucrées mobilisent d'énormes moyens pour séduire et encourager les jeunes, souvent dès l'enfance, à consommer leurs breuvages. 

Publié le: 17 octobre 2025

Mis à jour le: 17 octobre 2025

Par: Joëlle Delvaux

4 min

une enfant boit à la bouteille de coca

Photo: “© AdobeStock // Les boissons surcrées s'invitent dans l'univers des enfants et des jeunes.

La stratégie des fabricants de boissons sucrées pour attirer et fidéliser les jeunes se déploie autour des "4 P du marketing" : produit, prix, place, promotion. Cela se traduit notamment par des formats individuels plus grands (500 ml) pour les sodas et boissons énergétiques, assortis de prix attractifs, et par la présence de distributeurs automatiques dans les lieux de passage pour une accessibilité maximale. 
Les boissons sucrées s’invitent aussi dans l'univers familier des jeunes : événements sportifs, festivals, réseaux sociaux, jeux vidéo, influenceurs… Il s'agit d'ancrer la marque dans le quotidien et de normaliser la consommation. 
Par ailleurs, les fabricants investissent massivement dans des campagnes publicitaires où les produits sont associés à des moments de partage, de plaisir ou de performance. Les codes graphiques et slogans sont pensés pour résonner avec les aspirations des jeunes. Enfin, les mini formats, les associations de produits avec des personnages, les packagings colorés et éditions limitées sont autant d’outils pour capter l’attention des enfants. 

Des réglementations à respecter

La législation européenne réglemente les allégations autorisées et interdites en matière de nutrition et de santé pour garantir une information transparente. De même, le Code belge de droit économique interdit les pratiques trompeuses ou agressives. Mais la réglementation en matière de publicité et de distribution des boissons sucrées repose essentiellement sur des initiatives d’autorégulation, y compris dans les écoles. En effet, le secteur des boissons rafraîchissantes s'est engagé à ne plus vendre de boissons sucrées dans les écoles primaires et secondaires. Toutefois, la vente de boissons pauvres en calories reste autorisée en secondaires.  

"En Belgique, les législations sont assez souples, admet Daphnée Boizard, professeure de marketing à l'Ephec. Plutôt que d'interdire, on fait confiance à la responsabilité des fabricants et des consommateurs. Du reste, les marques sont conscientes de leurs responsabilités sociales et environnementales, juge la professeure qui estime que pour plus d'efficacité, les législations doivent se prendre au niveau européenPar exemple, rendre le Nutri-score obligatoire. 

Code d'autorégulation ou brand marketing

À partir de janvier 2026, le Code d'autorégulation qui encadre la publicité pour les denrées alimentaires (Belgian Food Advertising Code) s'enrichit de "nouveaux engagements" du secteur : interdiction de la publicité pour les boissons sucrées, glaces, chips et confiseries, destinée aux enfants jusqu'à 16 ans (au lieu de 13 ans) et respect d'une zone de 150 mètres autour des écoles, sans publicités pour les produits sucrés et salés. Une bonne nouvelle ? "Ce code, c'est avant tout, pour les marques, une manière de soigner leur image, soupire Laurence Doughan, experte en politiques nutritionnelles au SPF Santé publique. On peut parler de passoire nutritionnelle. Les fabricants s'autorisent toujours à promouvoir les produits 'à faible teneur en sucre, en matières grasses et en sel' auprès des 13 ans et plus. On attend de voir donc On attend de voir si les nouvelles règles auront pour effet de réduire l’impact du marketing pour des produits trop sucrés, trop salés et trop gras auprès des jeunes".

Une politique de santé publique ? 

Il y a plusieurs années, le Québec a lancé un plan d’action ambitieux pour faire baisser la consommation de boissons sucrées et promouvoir l’eau, en particulier chez les jeunes générations : amélioration de l’accès à l’eau potable, campagnes de sensibilisation, encadrement de la publicité, restriction de l'accès aux boissons sucrées… Une évaluation partielle du plan, en 2021, a révélé des avancées modestes mais significatives. Le Québec s'interroge depuis sur les mesures susceptibles de réduire les inégalités sociales de santé. Car la prévalence de la consommation de boissons sucrées est plus élevée dans les milieux sociaux précarisés et modestes. Et en Belgique ? Les constats sont similaires. Nos responsables politiques ne pourraient-ils pas s'inspirer des ambitions québécoises ?