Incapacité de travail
Aider et accompagner des personnes porteuses d'un handicap moteur dans leur parcours d'insertion sur le marché de l'emploi ordinaire : telle est la mission que s'est fixée le Fonds Andrée Maes. L'appel est lancé aux personnes intéressées !
Publié le: 18 octobre 2022
Par: Joëlle Delvaux
6 min
Photo: © AdobeStock - Avec le bon environnement de travail, une personne avec un handicap est tout à fait capable d’être compétitive
"Bien qu'ayant un handicap moteur (1), j’ai eu la chance de réaliser une carrière complète dans le circuit économique ordinaire. Je me suis épanouie dans le travail et je suis fière d'avoir pu contribuer à la sécurité sociale, lance d'emblée Andrée Maes qui a dirigé pendant de nombreuses années l'Association chrétienne des invalides et handicapés (ACIH), devenue Altéo. Personne n'est responsable de son handicap. Mais lorsqu'on est capable de travailler, il faut le faire. Cela procure d'énormes satisfactions personnelles, une reconnaissance sociale. Je souhaite vivement que d’autres personnes puissent vivre cette même expérience. C’est la raison pour laquelle, avec d’anciens collègues, j’ai créé 'le Fonds Andrée Maes' dont la gestion a été confiée à la Fondation Roi Baudouin."
Le Fonds Andrée Maes est donc né d’une conviction selon laquelle l’émancipation des personnes porteuses d’un handicap moteur passe par une plus grande participation au marché "ordinaire" du travail. Non seulement parce qu’une activité professionnelle permet, la plupart du temps, un meilleur niveau de vie mais surtout parce que cette participation génère une meilleure estime de soi. Le Fonds entend aussi oeuvrer à l’objectif d’égalité entre les personnes quelles que soient leurs différences physiques et motrices. Il y a du pain sur la planche car si le taux d’emploi de la population de 15 à 64 ans atteint 65%, celui des personnes en situation de handicap plafonne à 23 %. Il est d'ailleurs l'un des plus faibles d'Europe !
Pour mener à bien son projet, le Fonds a choisi la collaboration du Centre européen du travail (CET) localisé à Namur, Ciney et Thuin. Ce centre d'insertion socioprofessionnelle a plus de 30 ans d'existence et collabore avec une cinquante d'entreprises. Il met en place des actions de formation et d'accompagnement des demandeurs d'emploi. Il est aus si reconnu comme agence de placement et opérateur d'outplacement.
"Andrée Maes avait à coeur que l'accompagnement socio-professionnel soit réalisé par un organisme qui ne soit pas étiqueté comme spécialiste du handicap, précise Marie Hermans, directrice du CET. On n'arrive pas avec des outils spécifiques ou magiques. Le handicap est un frein à l'insertion com me il en existe d'autres. Et la rencontre avec d’autres demandeurs d’emploi durant le parcours est bénéfique."
Le principe est de considérer la personne avec un handicap comme capable d’être compétitive si le bon emploi et le bon environnement de travail peuvent être mis en oeuvre. "La collaboration avec le CET doit permettre à la personne concernée de multiplier ses chances pour trouver un emploi en lien avec ses compétences", précise Andrée Maes.
Les premiers accompagnements réalisés avec l'appui du Fonds se sont déroulés dans le contexte de la crise sanitaire. "Au départ, les porteurs du projet visaient un public de jeunes en fin d'études supérieures. Des informations ont été diffusées dans les Hautes écoles de la région, explique Marie Hermans. Mais les premières demandes nous sont parvenues via le Forem et l'AViQ, preuve que l'accompagnement personnalisé répond aus si à un besoin chez des personnes plus éloigné es de l'emploi."
En quoi consiste cet accompagnement ? "Il n'y a pas de trajet-type, répond Marie Hermans. On propose un programme à la carte en fonction des besoins de la personne : bilan de compétences, construction d'un projet professionnel, outils pour optimaliser la recherche d'emploi, choix d'une formation ou d'un stage, démarches vis-à-vis de l'employeur, suivi du stage ou de l'emploi dans l'entreprise... Notre rôle est de faire en sorte que la personne réalise son projet. Lorsque des obstacles surgissent, nous cherchons avec elle des solutions possibles, résume Marie Hermans.
Mélusine fait partie des bénéficiaires du Fonds. Elle est épaulée depuis un an par une collaboratrice du CET à Namur. Après avoir interrompu des études de psychologue puis de soins infirmiers, la jeune femme de 24 ans s'était résignée, en pleine crise sanitaire, à s'inscrire comme demandeuse d'emploi. Une période noire pour Mélusine. Manque de repères, découragement, sentiment d'être oubliée des administrations, sans parler des difficultés liées à la maladie rare dont elle est atteinte. Lorsque l'assistance sociale de l'AViQ lui a parlé d'un accompagnement personnalisé, elle n'a pas hésité. Après plusieurs rencontres avec une accompagnatrice, elle a compris qu'il lui fallait exploiter sa fibre artistique. Elle a opté pour un bachelier en jeu vidéo à la Haute École Albert Jacquard. Rapidement, des contacts ont été pris avec la direction de l'établissement. "L'accessibilité est le premier critère car je me déplace en voiturette, précise Mélusine. Les bâtiments ne sont pas accessibles à 100% mais grosso modo, cela va. Et comme l'école n'est pas loin de chez moi, c'est plus facile. J'ai pu visiter les lieux, assister à des cours. On a aussi passé en revue les aménagements qui pourraient faciliter mes études : adaptation des horaires, utilisation d'une salle de repos..." Marie Hermans enchaîne : "Ce qui est remarquable dans cette Haute école, c'est le système de parrainage mis en place pour les étudiants porteurs d'un handicap. Mélusine pourra bénéficier de l'aide d'étudiants volontaires pour la prise de notes, l'accompagnement au cours, etc."
Cela fait un mois que Mélusine a entamé son cursus. "J'ai enfin l'impression d'avoir un but précis et d'être à ma place. L'aide de Stéphanie (l'accompagnatrice du CET – NDLR) m'est précieuse, notamment pour tous les aspects administratifs. Elle m'a accompagnée plusieurs fois à l'école. Et je sais que je peux compter sur elle en toutes circonstances. Vraiment, ce soutien est arrivé pile au moment où j'en avais besoin pour me reconstruire".
(1) Atteinte partielle ou totale de la motricité, notamment des membres supérieurs ou inférieurs.
Mélusine
Plus d'informations sur l'accompagnement offert par le Fonds Andrée Maes soutenu par la Fondation Roi Baudouin (Handi'cap vers l'emploi) : Centre européen du travail • 081 83 05 19 • lilon.be