Incapacité de travail
À la MC du Brabant wallon, on les appelle les "solidaires". Ces volontaires sont plus d'une soixantaine à rendre régulièrement visite à une personne âgée près de chez eux. Des rendez-vous réguliers, des moments de convivialité et de complicité.
Publié le: 15 décembre 2021
Par: Joëlle Delvaux
7 min
Photographie: © Dubois
Lorsque Myriam a pris sa retraite en 2018, elle n'a pas hésité un seul instant à rejoindre l'équipe de volontaires du "Lion solidaire". 'J'ai terminé ma carrière en maison de repos et les contacts avec les personnes âgées me manquaient, confie-t-elle. Je viens juste de terminer l'accompagnement d'un monsieur atteint de la maladie d'Alzheimer parce qu'il est parti en maison de repos. Je reste disponible pour son épouse si elle le souhaite mais je ne suis pas intrusive. Ces derniers mois, elle et moi avons beaucoup parlé librement et sans tabou de la maladie de son mari et de ce qu'elle vivait et ressentait. Il y a quelques années, j'ai été moi-même confrontée à cette maladie dont était atteinte ma maman. Ça nous a rapprochées et je pense que j'ai pu l'aider".
Depuis quelques semaines, Myriam rend aussi régulièrement visite à une dame octogénaire qui vit seule. "On papote, on joue au scrabble, on prend un goûter, on fait une petite promenade... Lorsqu'elle est déprimée ou triste, j'essaie de lui redonner de l'allant avant de la quitter. Il faut dire que les journées sont longues, très longues quand on est isolé et qu'on n'a pas à s'occuper. Encore plus si l'on est en perte d'autonomie. Il y a des personnes qui ne voient ni ne parlent à personne pendant plusieurs jours d'affilée ! Et même si elles bénéficient d'aides à domicile ou reçoivent la visite d'un voisin ou de de la famille, le temps leur parait long". La visite régulière d'un ou d’une "solidaire" représente une bouffée d'oxygène dans un quotidien qui s'étire.
L'idée des "services solidaires" est venue d’un groupe de volontaires de la MC dont Lucie, qui avait travaillé comme infirmière à la Croix Jaune et Blanche. "Notre timing était si serré pour réaliser les soins qu’on n'avait pas le temps de s’asseoir, de prendre un café ni de consacrer quelques minutes à écouter le patient dont on sentait pourtant qu’il avait besoin de parler. Quand on a la vocation de prendre soin des autres, c’est un crève-coeur de dire ‘Je n’ai pas le temps’ et de fermer la porte derrière soi".
Aussitôt pensionnée, Lucie a élaboré, avec les associations Altéo et Enéo présentes dans son comité local, un projet visant à apporter aux personnes isolées une présence et une écoute bénévoles, en complémentarité avec les services professionnels de l’aide et des soins à domicile. À partir de là, la MC du Brabant wallon a co-construit ce projet solidaire avec ses volontaires et apporté les conditions matérielles nécessaires à sa réalisation.
Initié à Braine l’Alleud et Waterloo en 2011, le "Lion solidaire" a fait des petits depuis. Les "services solidaires" sont désormais au nombre de quatre, qui assurent des visites à domicile gratuites sur une bonne partie de la Province.
"Les demandes viennent généralement de la personne isolée elle-même mais parfois aussi d’une infirmière ou d’une aide familiale qui a parlé de notre service, explique Lucie qui assure encore et toujours la coordination du "Lion solidaire" de manière bénévole. En principe, nous fonctionnons par binômes : deux volontaires se relayent pour rendre une visite de courtoisie à la même personne chaque semaine. Cela permet de créer des liens véritables sans que ce ne soit ni trop lourd ni trop envahissant pour le volontaire. Et pour la personne bénéficiaire, c'est plus enrichissant aussi de voir alternativement deux personnes".
Bien évidemment, la crise sanitaire a nécessité de repenser l'organisation. Durant le premier confinement, les visites ont dû être suspendues mais les liens n’ont pas été rompus pour autant : visites au jardin ou sur le pas de la porte, coups de téléphone, conversations virtuelles, cartes postales…. Depuis, les services solidaires ont été reconnus par les autorités comme services essentiels. Les visites ont pu reprendre en tenant compte des desiderata de chacun. Mais les contacts ont été limités à un seul volontaire par bénéficiaire. Et des kits de protection contre le Covid (gel hydroalcoolique, masques…) ont été fournis aux volontaires avec la consigne de respecter les gestes barrières.
"Le lien social a dû se réinventer afin que chacun puisse traverser cette période avec le sentiment de compter pour l’autre, analyse Caroline Elias, responsable du Centre Mutualiste de santé de Nivelles et coordinatrice du volontariat. On aurait pu craindre que la crise sanitaire entraîne un repli sur soi, un recul de l’engagement. Or, non seulement les volontaires n’ont pas déclaré forfait, mais de nouveaux candidats se sont mobilisés dont des jeunes désireux de se rendre utiles et de créer des liens avec des seniors", se réjouit-elle.
Pour les "volontaires solidaires", un des atouts majeurs de ce volontariat de proximité, c'est de pouvoir compter sur un encadrement et de faire partie d'une équipe. "Ce qui est vivifiant, ce sont les réunions d'équipe et les formations continues régulières, s'enthousiasme Myriam qui, outre des visites, assure aussi l'accueil téléphonique et l'administration du service un matin par semaine. Cela crée des liens autour d'un projet commun et nourrit notre engagement. Par exemple, j'ai beaucoup appris d'une journée de formation consacrée au deuil".
Les volontaires bénéficient effectivement d’une formation de base axée sur l'écoute et sur la connaissance des métiers du domicile, à laquelle s'ajoutent des journées de formation thématiques, une fois par trimestre. "Les volontaires doivent savoir qu’ils ne sont pas abandonnés à eux-mêmes et qu’il ne leur appartient pas de tout assumer ni de tout résoudre", assure Caroline Elias.
"Les modalités des visites sont à décider avec le bénéficiaire, en coordination avec les proches et les prestataires du domicile mais 'les solidaires' ne se substituent pas aux services professionnels de la vie journalière, précise Lucie. Le volontaire apporte aussi un soutien aux aidants proches en prenant le relais quelques heures par semaine. "On est clairement dans l'être et pas dans le 'faire', résume la coordinatrice du Lion solidaire. Le volontaire offre une écoute, une présence, une aide à la lecture, un appui pour une promenade, un moment de conversations, une partie de cartes... Il n'assure pas de soins, de transports, de préparation de repas, etc."
"La relation se tisse progressivement, témoigne Béatrice, une volontaire active professionnellement, qui s'est engagée au Lion solidaire pendant la crise sanitaire. La dame chez qui je vais régulièrement m'accueille toujours chaleureusement. Elle aime préparer de bons petits plats et me propose parfois de manger avec elle le soir pour ne pas être seule. Elle me témoigne beaucoup de reconnaissance. Elle aime bien me parler de son vécu et est désireuse que j'en fasse de même, en lui montrant mes photos de vacances par exemple. Ça la fait voyager. Elle me parle beaucoup de ses relations apparemment compliquées avec ses enfants. Je l'écoute avec attention mais j'essaie aussi de la renvoyer à ce qu'elle souhaite elle-même plutôt que de subir beaucoup de choses, comme cela semble le cas. Je vois que cela fait du chemin en elle, et je sens qu'elle prend de l'assurance. En dehors de mes visites chez elle, on s'échange aussi des messages, on se téléphone…"
"Les visites que l'on donne, ce sont aussi des visites que l'on reçoit, confirme Myriam. On est d'égal à égal. Il y a une réciprocité inattendue. Les personnes âgées ont un sens incroyable de la solidarité. On a tendance à l’oublier mais elles ont une richesse et une expérience inouïes qu'elles ne demandent qu'à partager". Bernadette, une bénéficiaire, témoigne aussi de ces échanges bénéfiques : "Je vais vers mes 80 ans et je suis veuve. Je veux rester chez moi le plus longtemps possible. Je ne peux pas me plaindre car je suis encore en bonne santé. La volontaire qui passe de temps en temps m’aide à me rappeler des bons souvenirs de ma vie. Quand elle est là, je vois la vie autrement".
Un peu partout en Belgique, des associations proposent des visites de volontaires au domicile des personnes âgées, malades ou handicapées. Par exemple : la Croix-Rouge, Bras dessus bras dessous, l’Armée du Salut, les Unités pastorales…
Les personnes intéressées par ce volontariat de services de proximité peuvent contacter la plateforme francophone du volontariat (PFV) qui répertorie toutes les formes de volontariat proposées par des organisations dans des secteurs variés.
Plus d'infos : PFV • 02 512 01 12 (du lundi au vendredi, de 8h30 à 16h30) • levolontariat.be
Vous habitez en Brabant wallon et vous désirez recevoir une visite ou devenir "volontaire solidaire" ? Voici les points de contact locaux :
Pour en savoir plus sur le volontariat en Brabant wallon, vous pouvez aussi téléphoner au 067 89 36 28 ou envoyez un mail à [email protected]. Plus d’infos sur le volontariat à la MC sur mc.be/volontariat
Myriam